Combien de gaz à effet de serre émet un téléviseur?

La transition numérique est établie comme réalité incontournable : ce processus d’appropriation des nouveaux usages du numérique et l’intégration des nouvelles technologies dans l’organisation des entreprises a vocation à améliorer la compétitivité ou – et c’est comme cela qu’on nous la vend – à faciliter l’action dans le travail. Le piège s’est déjà refermé puisqu’il est quasiment impossible aujourd’hui d’échapper au numérique.

Or, les chercheurs ont déjà lancé l’alerte ! Le numérique a un impact désastreux sur la planète, tant sa consommation énergétique devient un gouffre abyssal. En effet, en incluant les émissions totales de l’emprunte carbone liées au cycle de vie des outils numériques, il faut prendre en compte la fabrication (matières premières, transport…), l’usage (consommation d’électricité, entretien) et la fin de vie (recyclage, mise en décharge…) ; dans ce calcul, la consommation de CO2 devient astronomique. Et c’est encore pire lorsque l’on y ajoute les nouveaux usages liés au numérique : stockage des données (Datacenter, blockchain), objets connectés, intelligence artificielle…) ; el l’arrivée de la 5G va encore en démultiplier les effets !

Selon une étude publiée dans la revue Patterns, les téléphones, ordinateurs, télévisions et autres centres de données génèrent entre 2,1 % et 3,9 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre (GES), contre 2,5 %… pour l’aviation civile !

Entre 2002 et 2012, les émissions du secteur de la communication numérique ont fait un bond de 40 %, soit une croissance annuelle de 1,8 %. « Les émissions du secteur progressent ainsi pratiquement deux fois plus vite que les émissions globales », alertent les experts. Et encore bien même que les émissions du secteur du numérique resteraient stables d’ici 2050, elles représenteraient 35,1 % des émissions globales d’ici là.

Et le serpent continue de se mordre la queue ! La consommation électrique domestique a diminué durant les 15 à 20 dernières années, grâce notamment aux progrès des fabricants en matière d’efficience énergétique. Par effet domino, cette efficacité accrue augmente la tendance à avoir un usage plus intensif quand les appareils consomment moins.

Des émissions insoupçonnables de gaz à effet de serre

Selon ces calculs globaux du cycle de vie des outils numériques, la fabrication d’un téléviseur de 11,4 kg émet la même quantité de gaz à effet de serre (GES) qu’un aller-retour en avion Paris-Nice, et mobilise 2,6 tonnes de matière (minerais, pétrole, charbon, eau…) ; ainsi, un ordinateur de 2 kilogrammes mobilise entre autres, 22 kilogrammes de produits chimiques, 240 kilogrammes de combustible et 1,5 tonne d’eau claire…

Un article du Monde Diplomatique (Quand le numérique détruit la planète, Guillaume Pitron, n°811, octobre 2021) explique le principe du « sac à dos écologique » : il représente le ratio de ce  que nous portons sur le dos (impact environnemental des ressources mobilisées et déplacées) en fonction de l’objet que nous portons dans la main… Un smartphone nécessite 183 kilogrammes de matières premières pour 150 grammes de produits finis : un ratio de 1200/1 ! Quant à la puce électronique, le cœur technique du téléphone, le ratio passe à 16000/1 avec 32 kilogrammes de matière pour 2 grammes de circuit intégré !

A l’échelle d’une entreprise comme Pollen, dans laquelle on peut facilement comptabiliser environ 110 ordinateurs et 110 smartphones, notre coopérative, aux valeurs marquées en termes d’écologie utilise :

Pour ses ordinateurs

  • 2 420 kilogrammes de produits chimiques
  • 26 400 kilogrammes de combustible
  • 165 tonnes d’eau claire

Pour ses smartphones

  • 20 130 kilogrammes de matière première
  • Avec 3 520 kilogrammes de ressource

Et en plus, si on ajoute la fameuse obsolescence programmée, la durée de détention moyenne d’un téléphone mobile est d’à peine 25 mois. Les écrans ont également tendance à s’agrandir, avec pour conséquence une croissance exponentielle des émissions. Alors qu’un téléviseur de 20 pouces nécessite une puissance 20 watts pour fonctionner, un 60 pouces en requiert entre 110 et 150, soit six à sept fois plus, souligne un rapport de l’Ademe de 2018…

Pour limiter le réchauffement à 1,5 °C, il faudrait que le secteur du numérique réduise son empreinte carbone de 42 % d’ici à 2030 et de 91 % d’ici 2050, calculent les experts. Difficile à imaginer quand on voit l’explosion des usages et du nombre d’appareils en circulation.

Alors que faire ?

Est-ce une capitulation et advienne que pourra ? C’est en ce sens que le piège est rude : finalement prisonniers des nouvelles technologies, leur usage est contraint même si l’impact leurs outils est catastrophique. Nous vivons, toutes et tous, dans ce paradoxe de lutte contre le désastre planétaire environnemental et humain lié à l’exploitation humaine des ressources naturelles de la terre et la pression, voire l’obligation, d’être amenés à utiliser ces outils.

Aujourd’hui, la seule façon de limiter considérablement l’impact des produits électroniques est d’augmenter au maximum leur durée de vie. Dans la cadre de la responsabilité sociétale des entreprises (RSE), des acteurs se lancent dans ce défi. Évidemment moins connus que les GAFAM, ils s’emploient à proposer une sélection d’appareils plus réparables et plus durables, notamment par un modèle de location, sans option d’achat, lequel garantit que le fournisseur a tout intérêt à faire vivre ses appareils le plus longtemps possible, sur plusieurs cycles de location si besoin. À l’inverse du modèle de vente où tous les moyens sont bons pour pousser au renouvellement, il s’agit d’accompagner, dans la durée, l’usage d’un même appareil.

En lien avec la réflexion de ses associés, Pollen envisage de s’engager sur cette voie responsable. Assurément, la RSE devient aussi une de nos priorités stratégiques. Afin d’avancer, nous avons déjà établis des liens à titre professionnel et personnel avec la société coopérative d’intérêt collectif (SCIC) « Commown ». Elle peut potentiellement nous proposer des solutions techniques en louant des ordinateurs et smartphones, réparables et dont la durée de vie est très sérieusement rallongée. Ces outils mettent principalement en avant la marque « why! », en raison de son positionnement résolument ambitieux de lutte contre l’obsolescence et des logiciels libres. Cette offre de location avec services, entre au cœur du modèle vertueux de l’économie de la fonctionnalité.

Pour compléter votre information : Guillaume Pitron témoigne sur France Culture : Énergies et numérique, quelle transition écologique ?

Quel est l'impact carbone d'une minute de vidéo ?

Le récent et détaillé rapport 2021 de Carbon Trust "Carbon impact of video streaming" éclaire nos lanternes en concluant que de regarder une heure de streaming en Europe émet 56 gCO2e.

Quel secteur émet le plus de gaz à effet de serre en France ?

Les transports, première source de gaz à effet de serre Selon cet inventaire, les transports sont la première source de gaz à effet de serre en France métropolitaine (29,7 % des émissions en équivalent CO2 en 2017), devant l'industrie et le secteur tertiaire (25,8 %) ou l'agriculture (18,9 %).

Quel est le pourcentage d'émission de gaz à effet de serre du secteur de l'énergie ?

Répartition sectorielle des émissions de CO2 dans le monde En Chine, l'industrie et le secteur de l'énergie (électricité et hors électricité) représentent à eux deux 83 % des émissions de CO2 dues à la combustion d'énergie, contre 65 % en moyenne mondiale.

Comment Netflix pollué ?

Selon une étude, regarder sa série préférée pendant une heure revient à utiliser une climatisation pendant 40 minutes. Au total, ce sont 100 g de carbone qui sont rejetés durant cette période. La plateforme est en retard par rapport aux autres géants de la tech sur ce sujet.